La cave, lieu mystérieux pour réunions théâtrales
LE MONDE | 03.06.2011 à 16h03 • Mis à jour le 03.06.2011 à 16h03 | Par Thomas Monnerais
Pour la sixième année consécutive, la compagnie Malanoche, originaire de Besançon, donne rendez-vous au public quelque part dans une ville de l’est de la France, le fait descendre dans une
cave, dont le lieu a été tenu secret jusqu’au dernier moment, et lui présente une création théâtrale originale. Depuis le 10 mai et jusqu’au 21 juin, le Festival de caves investit les sous-sols d’une vingtaine de communes. Les grandes villes sont l’exception, Lyon, Strasbourg et Besançon ; les petites, comme Montbozon ou Wangen, peu familières du théâtre, la règle.
Une volonté affirmée d’amener cet art dans des contrées reculées, mais aussi de profiter « de caves
incroyables, celles de châteaux, de forts, celles qui permettent des esthétiques différentes », explique
Guillaume Dujardin, fondateur du festival. « La cave est un lieu historique et symbolique incroyable,
qui occupe une place prépondérante dans l’inconscient des gens. » Un lieu mystérieux » qui permet
au public d’être dans une écoute et une concentration fortes. Plus que dans une grande salle, où s’il
veut dormir, rien ne l’en empêche ».
Le festival ne présente pas de pièces classiques – « trop de personnages, l’espace est trop petit » -,
mais privilégie les auteurs contemporains (Howard Barker, José Carlos Somoza), des textes
originaux, des réécritures, des adaptations, présentés par des professionnels. « Que des créations,
pas de reprises », insiste le metteur en scène. Tout ce que « la lourdeur des institutions ne permet
pas ».
Maud Le Grévellec, une comédienne habituée des scènes nationales, ne dit pas autre chose. Elle a
découvert le Festival de caves en 2010 et « a eu très envie d’y retourner car nous y sommes moteurs
des projets, nous pouvons proposer nos envies », affirme la jeune femme, qui présente avec deux
comédiens, un Cabaret des criminelles, »mais sans musiciens, ce qui réserve des surprises ». « C’est
un atelier de création, de recherche dans l’écriture et dans le jeu », confirme Josée Drevon, une
fidèle, qui cette année monte un spectacle sur le thème de la vie d’Andy Warhol. « C’est un privilège
dans ce métier de retrouver l’esprit de compagnie. » Ni loges, ni confort, ni habitude. Des conditions
de travail qui n’effraient pas ces comédiennes confirmées. « Elles ont l’impression de retrouver leur
jeunesse », résume Guillaume Dujardin.
« FRANCHISER » LE FESTIVAL
Une jeunesse qui a droit de cité. C’est l’une des marques de fabrique d’un festival qui laisse leur
chance aux jeunes professionnels. « Je peux proposer, je ne vais pas à l’abattoir. Et même si ça ne
plaît pas, on peut discuter », explique Léopoldine Hummel, comédienne fraîchement diplômée, qui
s’essaie au spectacle musical, le temps de la manifestation.
L’aventure du Festival de caves, dont la première édition a été organisée en 2006, doit sa naissance
à un « un coup de hasard, raconte Guillaume Dujardin. Nous devions jouer Journal, de Victor
Klemperer, un juif allemand résistant. A la lecture du texte, l’idée de jouer dans une cave s’est
imposée. On a senti les spectateurs réceptifs, on a décidé de continuer ». Le bouche-à-oreille et le
réseau des bénévoles de la compagnie ont fait le reste.
Aujourd’hui, le metteur en scène souhaite développer son festival à l’économie modeste – un budget
de 63 000 euros, subventionné aux deux tiers. Et « le franchiser pour que des compagnies d’autres
régions de France s’en emparent et investissent elles aussi les caves ».
Festival de caves, seize spectacles dans vingt-trois communes.
Tél. : 03-81-83-25-04. Jusqu’au 21 juin. De 7 € à 12 €.
Compagniemalanoche.fr